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Ciane Xavier est la pop surréaliste qui crée de l'art portable

Jun 24, 2023

Par Stéphanie Frondoso

Photographie de Jan Mayo

Photographié par Jan Mayo

"Ce masque est censé symboliser la tendance croissante à la censure et à la culture d'annulation dans la société d'aujourd'hui", explique Ciane Xavier en enfilant un bijou qui couvre la moitié de son visage.

La sculpture en bas-relief représentant une tête humaine avec des oreilles de lapin, motif récurrent dans son travail, a été réalisée dans son home studio, intime par rapport à son espace principal où sont fabriquées de grandes sculptures. Dans cette pièce, elle conserve une imprimante 3D spécialisée pour l'impression de résine liquide et sa machine de durcissement requise. Des ensembles de minuscules grattoirs et pinces sont disposés sur son bureau de travail, ainsi que des composants de bijouterie. Contre le mur se trouve un ordinateur de bureau Alienware, qu'elle utilise pour concevoir des jeux et réaliser des sculptures.

Les bijoux de Ciane sont des versions provocantes de la taille d'une paume des sculptures figuratives à taille humaine pour lesquelles elle est bien connue. Elle enfile un collier constitué d'un corps humain miniature qui s'étire, se recourbe vers l'arrière, s'enroulant autour de sa gorge pour apparemment l'étouffer. Puis elle attache une boucle d'oreille en forme d'oreille ; l'effet était comme être sur le tournage d'un film de science-fiction. Au bout des doigts, elle enfile de délicats ornements d'ongles. Ciane a conçu ces œuvres pour que le public puisse s'intéresser à son art à un niveau personnel, dans le cadre de ses activités quotidiennes, « au lieu de s'asseoir sur une étagère ou de s'accrocher à un mur ». Nous avons essayé les bijoux. Ils s'adaptent bien au corps, légers et confortables à porter.

Le processus d’impression 3D de bijoux est plus complexe qu’il n’y paraît à première vue. De la résine liquide est versée dans la machine et imprime en couches. Les pièces sortent dans un état brut, avec des fragments de support complexes qui leur sont attachés. S'ensuit un post-traitement fastidieux avec lavage dans un bain d'alcool, durcissement sous lumière UV, découpe méticuleuse du support, ponçage et limage avec des outils métalliques et une perceuse à main, jusqu'à ce que les pièces finales soient brillantes et raffinées. Enfin, Ciane ajoute une couche de finition de résine liquide.

Née au Brésil, Ciane a commencé sa carrière en tant que mannequin qui l'a amenée à vivre et travailler dans 14 pays différents avant de s'installer aux Philippines. Aujourd'hui chez elle depuis dix ans, elle confie qu'elle a eu la chance « de fonder une famille ici, avec mon mari philippin et nos deux enfants. Vivre aux Philippines a joué un rôle important dans l’élaboration de mon travail artistique et créatif et, plus important encore, m’a procuré un sentiment d’appartenance inestimable.

Les migrations constantes qui ont précédé le déménagement définitif de Ciane ont généré une perte d'identité culturelle très ressentie, mais expliquent également sa dextérité à passer avec agilité entre les médiums et les formes d'art. Tout en reconstruisant sa propre identité, elle examine simultanément le sentiment d’identité plus déformé apparu à une époque influencée par les médias sociaux et ses effets sur les comportements et les façons de penser. Elle le fait en décrivant des corps à la fois humoristiques et inquiétants, avec des détails tels que des pieds élargis, des branches poussant sur les côtes et des oreilles d'animaux. De telles images incitent son public à réfléchir sur la vulnérabilité alors que les questions de honte corporelle et de santé mentale sont devenues plus visibles au premier plan. Ces préoccupations sont particulièrement pertinentes aux Philippines, où plus de 70 pour cent de la population, soit 84 millions de personnes, sont des utilisateurs des médias sociaux.

Entièrement autodidacte, Ciane travaille principalement sur la sculpture moulée et moulée pop surréaliste, la peinture figurative et l'installation vidéo. Au cours des dernières années, son travail a évolué vers l’impression 3D à grande échelle, la réalité virtuelle et le multimédia immersif. Elle expérimente constamment des matériaux industriels et diverses technologies, fusionnant de plus en plus d'éléments humains et non humains dans l'exploration de ses thèmes récurrents. Actuellement, elle travaille sur des animatroniques imprimées en 3D. Son récent passage à la joaillerie n’est pas une surprise, car l’intimité du bijou et sa relation avec le corps sont liées à ses investigations sociales en cours.